Coeur d’athlète

Gros moteur est-il synonyme de santé?

Par la Mountain Queen

Boum, Boum, Boum _________________________. La mort subite d’un athlète est simplement incompréhensible. Sa brutalité nous laisse sans mots, attaquant les individus qui semblent, à première vue, en excellente santé. Le cœur d’athlète peut être en cause dans cette tragédie, mais n’ayez crainte, le risque de mourir de cette façon est estimé à 0,002%. Par contre, les modifications adaptatives provoquées par l’entraînement d’endurance pratiqué de façon assidue, entraîne des signes et symptômes liés à l’apparition d’arythmie cardiaque qui peuvent être bénignes mais très mal tolérées par l’individu.

Ok, je vous entends tous dire: modifications adaptatives, arythmie cardiaque… C’est bien beau ces mots je les connais, mais qu’est que c’est vraiment ?

Pour répondre à cette question, il faut tout d’abord connaître la base du système cardiovasculaire: le cœur!

Depuis la nuit des temps, l’organe qui bat sans relâche au creux du thorax, fascine l’être humain. Ce qui est tout à fait légitime, car notre vie dépend des battements de notre cœur qui n’est pas plus gros qu’un poing fermé. 

Petit rappel, comme vu dans l’article sur éviter la déshydratation, nous pourrions comparer les vaisseaux sanguins avec la canalisation d’une ville et les cellules de l’organisme aux habitants de la ville. 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24, les habitants consomment de l’oxygène et des nutriments puis produisent des déchets. Par contre, les cellules/ les habitants sont incapables de sortir de leurs maisons. Ils dépendent alors des transporteurs, le sang qui est responsable des échanges avec le monde extérieur. Le système de canalisation doit avoir une turbine pour faire circuler les transporteurs. Cette turbine qui est en fait une pompe, c’est le cœur. Il doit y avoir un bon débit pour que la turbine tourne assez afin d’alimenter notre corps. 

Le cœur n’est pas composé d’ une seule pompe mais bien de deux côte à côte. 

Le côté droit est celui qui reçoit le sang pauvre en oxygène qui est riche en CO2 (dioxyde carbone) donc déchet. Cette pompe va propulser le sang aux poumons pour refaire le plein d’oxygène et expulser le CO2 à l’extérieur du corps. De cette façon, la maison reste dépourvue de pollution. 

Le cœur gauche reçoit le sang riche en oxygène qui revient des poumons et propulse celui-ci à l’ensemble du corps pour lui apporter oxygène et nutriments aux tissus. 

Cette formidable machine possède deux points d’entrée pour le sang: oreillette droite et oreillette gauche, qui reçoivent respectivement le sang des poumons et du corps. Puis deux points de départ qui poussent le sang soit dans la circulation pulmonaire ou systémique. 

Pour terminer dans les explications avec la circulation, il est important de préciser que le sang circule dans un sens unique et cette unicité est assurée par des valves, qui s’ouvrent et se referment avec les variations de pression exercées à la surface de celles-ci. 

Il y a donc 4 valves qui sont d’une importance capitale. 

Schéma - Système cardiovasculaire humain
Schéma – Système cardiovasculaire humain

Comme n’importe quelle machine, les pompes du cœur ont besoin d’un circuit électrique propre à chacune d’elles. Sinon, nous vivrions une véritable catastrophe. Chaque section doit pouvoir avoir le temps de se remplir et se vider avant de propulser le sang dans une nouvelle portion. Cette activité électrique dirige la fréquence (vitesse) et le rythme cardiaque. Lorsque le cœur bat avec une fréquence entre 60-100 battements par minute et qui est régulier, on parle d’un rythme sinusal normal.

Le trajet de ces signaux électriques parcourt le coeur dans un ordre bien précis: 

  1. Le noeud sinusal
  2. Le noeud auriculoventriculaire
  3. Le faisceau auriculo ventriculaire
  4. Les branches droites et gauches du faisceau auriculo ventriculaire ou faisceau de His
  5. Parois internes des ventricules (fibres de Purkinje) 

Honnêtement, c’est mon côté geek qui vient d’énumérer le parcourt électrique. Tout ce que vous avez besoin d’assimiler c’est que l’impulsion électrique traverse le cœur de haut en bas, soit des oreillettes aux ventricules. Chacune leur tour, les parties du cœur se contractent pendant que les autres se dilatent. Mais il faut comprendre que le nœud sinusal est le chef d’orchestre de cette fanfare. Il est rythmogène ou pacemaker si vous préférez.  

  

Ce rythme cardiaque de base est intrinsèque, ce qui veut dire qu’il ne repose pas sur le système nerveux. Il est autonome. La preuve, lorsque le cœur est détaché de toutes les connexions nerveuses, comme dans un cas de greffe cardiaque, il continue de battre régulièrement… C’est vraiment une formidable machine ! Par contre, cette activité électrique intrinsèque peut également être soumise à des influences extrinsèques par intermédiaire des nerfs qui arrivent jusqu’au cœur. Ces influences permettent de modeler la fréquence cardiaque selon les besoins de l’organisme. Nous appelons ces influences le système nerveux sympathique (l’accélérateur). Il augmente le rythme et la force du battement cardiaque. Puis il y a le système nerveux parasympathique (le frein), qui ralentit le cœur. Ce dernier représente le nerf vague. Le système nerveux autonome est une balance entre ces deux rapport opposés.    

Tout bon athlète se doit d’avoir un gros moteur/ cœur pour performer en endurance. Mais ce gros moteur ne rime pas toujours avec bénéfice pour l’individu.    Quand un athlète pratique plus de 6  heures de sport intense par semaine depuis plus de 6 mois avec une VO2 max supérieure ou égale à 60%, il entraîne inévitablement des modifications liées aux caractéristiques du cœur d’athlète.

Petit rappel: La VO2 max (consommation maximale d’oxygène) c’est la quantité maximale d’oxygène que l’organisme réussit à consommer dans une unité de temps. En d’autre mots, c’est la quantité maximale d’oxygène que le corps est capable de retirer de l’air extérieur, pour ensuite la transporter jusqu’aux tissus dans le besoin lors de l’activité sportive.

Durant un effort d’endurance, une augmentation du débit cardiaque est nécessaire. Elle peut atteindre 40 litres/minute, ce qui représente sur le long terme une immense surcharge de volume pour le cœur. Jumelé à cela, il y aura une élévation de la pression artérielle qui à son tour va engendrer une surcharge de pression sur le myocarde. Cette coexistence de volume et pression vont jouer un rôle dans les modifications morphologiques et fonctionnelles (électriques/rythmiques).L’ensemble de ces modifications va permettre au sportif d’augmenter sa tolérance à l’effort. C’est ce qui définit le cœur d’athlète. 

Ces adaptations peuvent entraîner des signes et symptômes de gravité variable, mais pourquoi ?

En bref, ces surcharges de volume et pression engendrent une dilatation et/ou un épaississement du ventricule gauche, ce qui permet de normaliser les besoins exponentiels de l’organisme au cours de l’effort. Il y aura aussi une dilatation des oreillettes causée par l’augmentation du débit cardiaque. Lorsque nous pratiquons une activité physique a effort intense, l’augmentation du débit cardiaque étire le cœur. Dans celui-ci, il y a des portions plus susceptibles à cet étirement, comme les oreillettes dues à leurs minces parois. De plus, il y aura une augmentation du tonus vagal dû à un ajustement du système nerveux autonome qui permet d’abaisser la fréquence cardiaque au repos. Cette augmentation de débit et l’hyperactivité du nerf vague, rendent l’oreillette plus susceptible de se contracter de façon désordonnée, précise le  Dr. Martin Juneau, M.D., FRCP.  

Plusieurs arythmies peuvent découler du cœur d’athlète. Je ne vais pas faire le tour des arythmies mais seulement prendre le temps de vous expliquez une des plus fréquentes chez les athlètes de haut niveau (comme j’ai expliqué plus haut 6 heures par semaine …)  mise à part la bradycardie sinusal (rythme cardiaque en bas de 60 battements par minute puisqu’elle est à risque de complication.    

Vous vous rappelez lorsque je vous ai parlé du chef d’orchestre, celui qui contrôle le lancement de la conduction électrique. C’est donc celui-ci qui est logé dans l’oreillette qui disjoncte et envoie à son orchestre une série de signaux désynchronisés, anarchiques, rapides et sans fin. Cette arythmie se nomme fibrillation auriculaire (FA). Elle devient dangereuse si elle est soutenue et non traitée puisque l’anarchie empêche les cavités cardiaques de se vider complètement de leur sang chacun leurs tours. Il y aura donc toujours une quantité de sang stagnant qui finit par coaguler et former des caillots. Par la suite, les caillots risquent d’être propulsés dans la circulation sanguine et entraîner des accidents vasculaires cérébraux (AVC), un embolie pulmonaire et/ou un infarctus du myocarde, voire la mort…

Le mot d’ordre est rester à l’affût des signes/symptômes et consulter rapidement

Les principaux signes et symptôme de la fibrillation auriculaire sont:

  • Palpitations
  • Étourdissement 
  • Essoufflement 
  • Le coeur se met à battre très rapidement de façon irrégulière/ imprévisible 

L’exercice est indispensable à la prévention des maladies cardiovasculaires et à la santé en général. En contrepartie, l’exercice intense pourrait entraîner des complications… Comme la FA… Mais si l’activité est pratiquée de façon régulière d’intensité modérée… Elle diminue les risques de fibrillation auriculaire… Et oui! Je vous entends déjà tous rechigner que vous n’allez pas abandonner votre passion. Je ne vous dis pas non plus de ne pas la pratiquer mais de rester à l’écoute de votre corps et en cas de symptôme d’arythmie, CONSULTEZ VOTRE MÉDECIN!!!

MERCI, BONSOIR!

Références :

  1. Dr. Martin Juneau, M.D., FRCP. (2017) https://observatoireprevention.org/2017/01/17/fibrillation-auriculaire-chez-athletes/
  2. Dr Stranley Nattel (2013) Le sport à haute intensité pendant plusieurs années peut être nuisible pour le coeur:https://www.icm-mhi.org/fr/sport-haute-intensite-pendant-plusieurs-annees-peut-etre-nuisible-coeur-0   
  3. Pauline Gravel (2013) Quand le coeur des athlètes perd le rythme: https://www.ledevoir.com/societe/sante/379900/quand-le-coeur-des-athletes-perd-le-rythme 
  4. Comment le coeur fonctionne: https://www.coeuretavc.ca/maladies-du-coeur/qu-est-ce-que-les-maladies-du-coeur/comment-fonctionne-le-coeur
  5. Nawfel Hadri (2020), Thèse pour l’obtention du diplôme de médecine: Particularités électrocardiographiques chez les sportifs de haut niveau d’un club omisport au maroc:  http://ao.um5.ac.ma/xmlui/handle/123456789/18145
  6. Guy Lerebours (2007) Le rythme sinusal, mécanisme et fonction:  https://www.medecinesciences.org/en/articles/medsci/full_html/2007/08/medsci2007236-7p657/medsci2007236-7p657.html
  7. Pr François Carré (Hôpital Pontchaillou, Rennes)(2009) Le cœur d’athlète est-il arythmogène? https://www.clubcardiosport.com/sites/www.clubcardiosport.com/files/field/fichier/article/Le_Coeur_athlete_arythmogene.pdf
  8. F.Schnell, F. Carré (2013) Cardiomyopathy or athlete’s heart:La Lettre du Cardiologue • n° 469 – novembre 2013  

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