L’immunité sportive

Faire du sport mais à quel prix ?

Par la Mountain Queen

Le système immunitaire n’est pas un muscle que nous pouvons entraîner. Il paraît donc évident qu’être en forme n’est pas équivalent à avoir une défense immunitaire hors norme. Il faut toutefois faire attention à ce que je viens d’écrire. Il a été prouvé que l’activité physique régulière était bénéfique à une meilleure santé en générale. Ce qui veut dire: une diminution de la fréquence et de la sévérité/durée des signes et symptômes des infections des voies respiratoires supérieures (IVRS). Le hic c’est que cette courbe bénéfique pourrait se retrouver inversée et même sous la forme du modèle de courbe en « J » si l’individu dépasse un certain niveau d’intensité soutenu et prolongé. 

A l’aide de cette image, il vous est possible de constater la relation directement proportionnel entre l’intensité de la charge totale d’exercice et la hausse du risque d’infection des voies respiratoires

Quelques bases du mécanisme de défense de notre organisme

Avant de démystifier le mythe de la réalité de l’exercice et la suppression de l’immunité chez l’athlète, revoyons un peu de base du mécanisme de défense de notre organisme. 

Chaque jour, notre corps fait la guerre à des agents pathogènes qui cherchent un endroit bien douillet pour y vivre. Parallèlement à cette guerre permanente, l’organisme doit se mobiliser rapidement à des endroits bien précis pour prendre en charge les agressions physiques telles que les lésions, les traumatismes… Afin de colmater ceux-ci. Vous comprendrez bien que pour faire face à autant d’agressions, nous disposons d’une véritable armée organisée en plusieurs régiments qui remplissent chacune leurs fonctions dédiées. Ces mécanismes de défense se nomment l’immunité. Ils sont regroupés en 2 catégories.

  1. L’immunité innée
  2. L’immunité adaptative

La réponse immunitaire innée est constituée du système de défense de première ligne. Elle agit de façon rapide mais elle est non spécifique. Elle comprend la première ligne de défense qui est la peau et les muqueuses et la deuxième ligne de défense qui est assuré par une multitudes de cellules comme les cellules tueuses naturelles par la phagocytose (i.e : ingérer des particules étrangères solides, en bref, elles mangent les agents pathogènes) par réaction inflammatoire (nous en reparlerons plus loin dans l’article), fièvre, substances antimicrobiennes. 

L’immunité adaptative correspond à la troisième ligne de défense contre les microorganismes après que ceux-ci aient franchi l’immunité innée. Elle est plus lente mais spécifique aux agents pathogènes et elle a une mémoire qui lui permet de cibler plus rapidement les mêmes envahisseurs lorsqu’ils se présenteront de nouveau. Elle se défend avec de nombreuses cellules notamment des leucocytes ou si vous préférez des globules blancs. Je ne vais pas rentrer dans tout les détails des différentes cellules combatives et tueuses afin de simplifier la compréhension, mais il ne faut pas perdre de vu qu’il y a plusieurs sortes de leucocytes qui ont chacun un rôle spécifique dans la défense de notre corps. 

EN RÉSUMÉ: dans le sang, nous avons des globules blancs qui sont là pour nous défendre contre les agressions de toutes sortes. Il y a même des petits soldats dans notre salive, les d’IgA, pour nous défendre lorsque les agresseurs pénètrent par cette porte d’entrée. 

Les IgA sont la principale classe d’immunoglobuline présente dans les sécrétions des muqueuses ( la salive, les larmes et le mucus des tractus respiratoire, digestif et génito-urinaire), ce qui lui confère un rôle majeur au sein du système immunitaire muqueux. (1) 

Eve Tiollier, Gomez Danielle, Chennaoui Mounir et al.

Comme dit plus haut, notre système de défense s’active même en cas de lésion. Il ne faut donc pas avoir peur de l’inflammation normale qui est une réponse normale de l’organisme face aux blessures et aux infections.

Lorsqu’il y a blessure ou encore de l’irritation, le système de défense se rend le plus rapidement possible à l’endroit endommagé. Ce processus créer une dilatation des vaisseaux sanguins avoisinant, qui provoque un écoulement de liquides et de cellules immunitaires dans les tissus à proximité. Résultat: nous percevons les 4 signes de l’inflammation:

  1. Rougeur
  2. Chaleur
  3. Oedème (gonflement)
  4. Douleur       

Relations entre le système immunitaire et l’exercice physique

Tout d’abord, l’activité physique dite modérée se définit comme 3 à 5 séances semaine de 30 à 60 minutes avec une intensité de 40 à 60% du volume d’oxygène maximum. 

Ce type d’activité permet d’améliorer légèrement la réponse immunitaire puisque lors de l’exercice, il y a une forte production de micro blessures dans les muscles, ce qui déclenche le mécanisme pro-inflammatoire local dans notre organisme. Pendant l’activité, il y aura donc une meilleure circulation des substances qui permet de prévenir l’infection de plaies, par exemple, mais surtout une stimulation plus importante des lymphocytes (sorte de globules blancs), macrophages et immunoglobulines (IgA). 

Deuxièmement, pour dire que votre pratique sportive est intensive, elle doit être pratiquée plus de 3 fois par semaine pour une durée supérieure à 2 heures, avec un VO2 max supérieure à 60%.

Ce type d’excès provoque des conséquences néfastes sur l’organisme à plusieurs niveaux. Comme décrit dans plusieurs des mes autres articles, mais concentrons nous sur l’immunité.

Il y a encore beaucoup de contradictions dans la littérature à ce sujet, mais une certaine ligne directrice se trace. La pratique sportive intense influence la réponse immunitaire et quantitative. Il y aura une mouvance des neutrophiles (globules blancs responsables de manger les agents pathogènes) et des lymphocytes (globules blancs responsables de la production d’anticorps de destruction spécifique des cellules infectées…)  due à l’élévation du taux d’adrénaline dans le sang. Tandis que les neutrophiles augmentent, les lymphocytes diminuent parce que le sport constitue un stress pour le corps et pas simplement physique mais psychologique aussi. Ce stress fait élever le taux de cortisol pendant et demeure élevé post-effort. 

De plus, le taux d’ IgA salivaire diminue. Ce qu’il faut réaliser c’est que les voies aériennes et les poumons sont continuellement placés face à des agents pathogènes et toxiques. La voie buccale et la voie respiratoire permettent l’entrée dans l’organisme de la plupart des éléments pouvant être antigéniques. (2)

Les voies respiratoires ont la capacité de réchauffer l’air à la température du corps et à saturer celle-ci en humidité ce qui facilite les échanges gazeux et autres. La cavité nasale est une surface bien vascularisée et la muqueuse humide qui produit continuellement de l’eau facilite ce processus.

lors d’un effort physique, l’athlète passe d’une respiration nasale à une respiration buccale, ce qui entraîne un assèchement de la muqueuse respiratoire, une augmentation de la viscosité du mucus, une diminution du mouvement ciliaire et combiner à la diminution des IgA, expose potentiellement à un nombre accru de particules pathogènes et de risque d’infection. (3)  

Emmanuelle Boffi El Amari

En bref, lors de l’activité physique le corps est déjà bien occupé à gérer le stress, les lésions… inévitablement il sera moins disposé à défendre notre organisme. Tout cela demeure temporaire.    

Ce qui fait référence à la « théorie de la fenêtre ouverte » À la suite d’un effort intense et ou long, le système immunitaire subit différentes modifications. Que nous pourrions voir comme une période d’immunodépression, la fameuse «fenêtre ouverte»  et ce, jusqu’à 4 jours après la fin de l’effort. Plus la durée et l’intensité de l’activité est prononcée, plus la période de vulnérabilité est accrue. C’est pour cette raison qu’après une période d’entraînement intense ou une compétition, les athlètes tombent souvent malades.

Limiter les impacts sur le système immunitaire

Pour  limiter l’impact d’un entrainement intensif sur le système immunitaire, il existe des solutions:

  1. Une alimentation équilibrée est indispensable. 
  2. Un apport hydrique suffisant avant, pendant et après l’effort
  3. Commencer une activité par un échauffement 
  4. Terminer l’activité par des étirements 
  5. Se couvrir après l’activité pour éviter d’attraper froid
  6. Pratiquer des sessions d’entrainements courtes mais régulières plutôt que des sessions plus longues et occasionnelles
  7. Idéalement, 3 sessions d’intensité faible à modérée après chaque session intense pour permettre au corps de récupérer
  8. L’activité de récupération est indispensable et à réaliser juste après une activité intense.

Un athlète atteint d’une infection devrait-il poursuivre son entraînement ?

De façon générale, celui-ci peut prendre la décision au moyen d’une « vérification du cou » Si les symptômes sont localisés au-dessus du cou, comme:

  • Un écoulement nasal et une congestion 
  • Des maux de gorge

L’individu pourrait théoriquement poursuivre. Par contre, il devrait faire un petit test avant de commencer l’activité: faire de l’exercice à une intensité légère à modérée pendant quelques minutes et si les signes et symptômes restent stables, il pourrait poursuivre l’entraînement. MAIS SI il y a dégradation de ceux-ci, la marche à suivre est l’arrêt temporaire et le repos. 

ATTENTION!!!!!! Si les signes et symptômes sont systémiques (fièvre, courbature …. ) Vous devez vous ABSTENIR de pratiquer votre activité jusqu’à disparition des signes depuis quelques jours. Par la suite, reprendre graduellement l’entraînement. (4)

MERCI, BONSOIR!

Références :

  1. Eve Tiollier, Gomez Danielle, Chennaoui Mounir et al., « Exercice, immunoglobuline A salivaire et infections du tractus respiratoire », Movement & Sport Sciences, 2005/3 (no 56), p. 11-41. DOI : 10.3917/sm.056.0011. URL : https://www.cairn.info/revue-science-et-motricite1-2005-3-page-11.htm
  2. M.Veron Marine. (2016), Thèse pour le diplôme d’état de docteur en pharmacie: L’impact du sport sur le système immunitaire:https://pepite-depot.univ-lille2.fr/nuxeo/site/esupversions/243ca145-a236-4338-a6b5-e59e8f7902db
  3. Amari, E., B., E. (2010). ‘Infections des voies respiratoires supérieures et sport : qui joue ?…’, Rev Med Suisse 2010; volume -4. no. 258, 1499 – 1503 doi: .
  4. L Purcell, Société canadienne de pédiatrie, Section de de la médecine du sport et de la médecine en pédiatrie, L’exercice et les maladies fébriles, Paediatrics & Child Health, Volume 12, Issue 10, December 2007, Pages 889–892, https://doi.org/10.1093/pch/12.10.889
  5. Patrick Vachon, Ph.D. (2020) Exercice physique et système immunitaire: trop c’est comme pas assez:https://sportaide.ca/blog/2020/05/01/exercice-physique-et-systeme-immunitaire-trop-cest-comme-pas-assez-copy/
  6. Stéphane Bermon (2020) La Revue du praticien:La pratique du sport a-t-elle un impact sur l’état immunitaire ?:
    https://www.larevuedupraticien.fr/article/la-pratique-du-sport-t-elle-un-impact-sur-letat-immunitaire
  7. Dr Richard Marchand, M.D. (2020) L’exercice peut-il protéger contre les infections respiratoires ? https://observatoireprevention.org/2020/06/22/lexercice-peut-il-proteger-contre-les-infections-respiratoires%E2%80%89/
  8. Maryse Dupuis (2017) Éditions du renouveau pédagogique inc. (ERPI) Montréal: introduction à la microbiologie troisième édition: p 452 – 480 

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