Lactate ou acide lactique, c’est la même chose ?
Par la Mountain Queen
À noter que cet article fait suite à :
- L’ivresse mentale. Bigorexie, addiction sportive…(2 mai, 2021)
- La quête incessante du St-Graal : Démystifions les effets de la bigorexie (9 mai, 2021)
- In Aqua Veritas: Éviter la déshydratation (23 mai, 2021)
Ou d’autres questions comme ….
- Est-ce que c’est bon de générer des lactates?
- Est-ce que le lactate est produit juste durant l’effort anaérobie ?
- Est-ce un déchet métabolique ou est-il responsable des crampes et de la fatigue?
Je me suis intéressée à ces questions parce que le lactate est un sujet avec beaucoup d’idées préconçues. Pour une infirmière et formatrice de soins intensifs, les lactates ne sont plus un secret. Ils sont un de nos marqueurs d’efficacité des traitements et un indicateur de pronostic étant donné la sévérité de la pathologie induisant cette réponse.
La table est mise…. Passons au vif du sujet.
Lactate et non acide lactique
Pour débuter, utilisons la bonne terminologie. Lactate et non acide lactique, mais pourquoi?
Lors de l’activité physique, il y a une forte demande d’énergie (adénosine triphosphate ATP) afin de nourrir les cellules et pour assurer principalement le mécanisme de contraction musculaire. En vue de répondre à cette grande demande durant un effort de haute intensité, notre système de production normal n’est pas suffisant. Les cellules ont besoin de glucose (sucre) pour fournir rapidement l’énergie (ATP) : Du glucose, pas le temps de niaiser!
C’est ici que les lactates entrent en scène. Mais avant de s’appeler lactate, ce sont tout d’abord des acides lactiques (de là vient leur nom) qui se dissocient de leurs protons H+ et deviennent des lactates (l’acide lactique est soluble dans l’eau. Comme le lactate est dans le sang et dans celui-ci, il y a du plasma qui est composé à 90% d’eau).
Alors il est plus exact de parler de lactate et non d’acide lactique.
Les lactates permettent au corps de s’adapter aux situations où il y a une obligation d’un ajustement rapide et considérable de la dépense énergétique. De plus, ils aident l’organisme en souffrance en économisant le glucose qui sera utilisé par toutes les cellules ou organes en manque d’oxygène ou pas.
Les lactates sont les témoins d’une adaptation métabolique et ne sont pas des déchets toxiques, mais un substrat énergétique. En fait, plus tu produis des lactates rapidement, plus tu produiras de l’énergie donc… En conclusion… Plus le travail musculaire sera intense, plus tu iras vite à vélo.
Exemple : Lorsque “BIG” l’ami de l’autre BIG, aux mollets fraichement rasés pousse “sué pédales” lors de sa sortie à faire des laps sur le circuit CGV, son ami BIG peut crier avec justesse “BIG T’ES FULL PLUG SUR LES LACTATES!”
J’ajouterais à ma conclusion les extraits d’articles suivants :
Ce n’est pas un hasard non plus si le guépard qui peut courir à 100 km/h est un très gros producteur de lactate et si dans les exercices courts (de 10 s. à 5 min), les athlètes qui réussissent le mieux, sont ceux qui produisent le plus de lactate (Lacour et coll.1990) et par conséquent, fournissent à leurs muscles le plus d’énergie par unité de temps par la voie de la glycogénolyse (production de glucose en utilisant les réserves de glycogène contenues dans le foie ou dans les muscles). Elle peut être activée en quelques secondes seulement (Brooks et al., 1996, Spriet et al., 2000) Hultman et al. (1991) ont, en effet, pu observer une augmentation très significative de la lactatémie déjà après 6 secondes d’exercice, alors que la production d’ATP par voie aérobie requiert plusieurs minutes pour s’ajuster à l’augmentation soudaine de la demande énergétique. (1) p. 64
Georges Cazorla, Cyril Petibois, Laurent Bosquet et Luc Léger, 2001
la formation de lactate au cours des exercices intenses n’est donc pas liée à un manque d’oxygène, mais en fonction des vitesses des réactions pour participer au maintien d’une production très rapide en ATP. (2) p.21
Claire Thomas-Junius, 2011
Le muscle produit du lactate en permanence
Il est important de ne pas associer l’hyperlactémie à une hypoperfusion ou de métabolisme anaérobie seulement. (3)(4)…
OK wow!!!! Vous vous dites, c’est bien des beaux mots, mais ça veut dire quoi ? La réponse se trouve dans l’extrait suivant :
Il n’existe pas de puissance seuil au-dessous de laquelle le muscle ne produit pas de lactate et au-delà de laquelle il en produit. Le muscle produit du lactate en permanence, dès les premières puissances de travail les plus basses, même lorsque l’apport en oxygène est suffisant! (7)
Guy Thibault 2016
La fatigue ne serait pas attribuée à l’augmentation de lactate mais à l’acidose métabolique (voir article sur l’eau pour comprendre acidose métabolique) et aux lactates permettant d’assurer une élimination rapide de l’acidose sanguine et musculaire.
si le muscle ne produisait pas de lactate, l’acidose et la fatigue musculaire se produisent encore plus rapidement et la performance serait sévèrement altérée (5).
Claire Thomas-Junius (2008)
Et les fameuses crampes?
Le lactate n’interfère en aucune manière avec l’apparition de crampe, puisqu’on peut avoir une crampe au repos ou bien pour des efforts n’engendrant pas de production importante de lactate.(2)(5)
Que devient le lactate?
Si le lactate n’est pas utilisé pour permettre la création d’ATP, il est quand même en mesure de sortir de la cellule. Il peut alors se diffuser dans d’autres cellules afin d’être transformé en glucose, converti en ATP… ou autres (ex. Acides aminés).
Ici, je vais faire ma maman, mais ne négligez jamais la récupération active, qui est essentielle dans l’enchaînement d’efforts. Elle permet à la fois de transmettre plus rapidement des substrats énergétiques: en gros de la bouffe pour les muscles et de reconstruire les réserves de glycogène. Comme je vous l’ai mentionné précédemment, elle permet d’assurer une élimination rapide de l’acidose sanguine et musculaire.
Est-ce que c’est bon de générer des lactates?
En bref, à la lumière de cet article, dorénavant vous aimez les lactates! (elles sont vos amies comme le sont les rafales de vent lorsque celles-ci vous soufflent dans le dos!)
MERCI, BONSOIR!
Références :
(1) Georges Cazorla, Cyril Petibois, Laurent Bosquet et Luc Léger (2001) De Boeck Supérieur « Staps », Lactate et exercice : Mythes et réalités : https://www.cairn.info/revue-staps-2001-1-page-63.htm
(2) Claire Thomas-Junius (2011) Mémoire en vue de l’obtention du diplôme d’Habilitation à Diriger des Recherches, Adaptations métaboliques en réponse à la fatigue musculaire générée par l’activité contractile de haute intensité : https://hal.archives-ouvertes.fr/tel-03195732/
(3) Chabot Maude, Samuel Casavant, Isabelle Messier, Sébastien
Gingras (2019) Histoire de cas : M. Gagné (ARDS/ Choc septique) : St-Hyacinthe,
Hôpital Honoré-Mercier, département de soins intensifs et inhalothérapeutes.
(4) Dre Dionne, A-I., Les lactates, amis ou ennemis?
(5) Claire Thomas-Junius (2008), Réponses du métabolisme lactique au cours de sprints prolongés: Relation avec la performance : https://hal-insep.archives-ouvertes.fr/hal-01587358
(6) Fontaine É. (2013), Le lactate, substrat énergétique en réanimation ?: https://link.springer.com/article/10.1007%2Fs13546-013-0706-7
(7) Guy Thibault (2016), Faut-il craindre l’acide lactique et le lactate ?:https://nature-humaine.ca/2016/09/acide-lactique/
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